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Texte à méditer :   Un peuple civilisé ne mange pas les cadavres. Il mange les hommes vivants.   Curzio Malaparte
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Hors des sentiers battus
Limites éthiques de l'expérimentation sur le vivant
 "Concernant la partie des créatures qui est vivante, bien que dépourvue de raison, un traitement violent et en même temps cruel des animaux est opposé au devoir de l'homme envers lui-même, parce qu'ainsi la sympathie à l'égard de leurs souffrances se trouve émoussée en l'homme et que cela affaiblit et peu à peu anéantit une disposition naturelle très profitable à la moralité dans la relation avec les autres hommes. Cela est vrai quand bien même, dans ce qui est permis à l'homme, s'inscrit le fait de tuer rapidement (d'une manière qui évite de les torturer) les animaux, ou encore de les astreindre à un travail (ce à quoi, il est vrai, les hommes eux aussi doivent se soumettre), à condition simplement qu'il n'excède pas leurs forces ; à l'inverse, il faut avoir en horreur les expériences physiques qui les martyrisent pour le simple bénéfice de la spéculation, alors que, même sans elles, le but pourrait être atteint. Même la reconnaissance pour les services longtemps rendus par un vieux cheval ou un vieux chien (comme s'ils étaient des personnes de la maison) appartient indirectement aux devoirs de l'homme, à savoir au devoir conçu en considération de ces animaux, mais cette reconnaissance, envisagée directement, n'est jamais qu'un devoir de l'homme envers lui-même."
 
Kant, Métaphysique des mœurs, 1797, II, Doctrine de la vertu, Chapitre épisodique : de l'amphibologie des concepts moraux de la réflexion, § 17.

 
 "Maintenant se présente cette autre question. A-t-on le droit de faire des expériences et des vivisections sur les animaux ? Quant à moi, je pense qu'on a ce droit d'une manière entière et absolue. Il serait bien étrange, en effet, qu'on reconnût que l'homme a le droit de se servir des animaux pour tous les usages de la vie, pour ses services domestiques, pour son alimentation, et qu'on lui défendît de s'en servir pour s'instruire dans une des sciences les plus utiles à l'humanité. Il n'y a pas à hésiter ; la science de la vie ne peut se constituer que par des expériences, et l'on ne peut sauver de la mort des êtres vivants qu'après en avoir sacrifié d'autres. Il faut faire les expériences sur les hommes ou sur les animaux. Or, je trouve que les médecins font déjà trop d'expériences dangereuses sur les hommes avant de les avoir étudiées soigneusement sur les animaux. Je n'admets pas qu'il soit moral d'essayer sur les malades dans les hôpitaux des remèdes plus ou moins dangereux ou actifs, sans qu'on les ait préalablement expérimentés sur des chiens ; car je prouverai plus loin que tout ce que l'on obtient chez les animaux peut parfaitement être concluant pour l'homme quand on sait bien expérimenter. Donc, s'il est immoral de faire sur un homme une expérience dès qu'elle est dangereuse pour lui, quoique le résultat puisse être utile aux autres, il est essentiellement moral de faire sur un animal des expériences, quoique douloureuses et dangereuses pour lui, dès qu'elles peuvent être utiles pour l'homme".
 
Claude Bernard, Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, 1865, Champs Flammarion, 1984, p. 153.

  "La question de la vivisection mérite de nous arrêter un moment, bien qu'elle m'entraîne un peu hors de mon sujet. Il y a là un de ces conflits de devoirs que la vie pratique nous montre à tout instant. L'homme ne peut renoncer à savoir sans s'amoindrir ; et c'est pourquoi les intérêts de la science sont sacrés ; c'est aussi à cause des maux qu'elle peut guérir ou prévenir et dont la masse est incalculable ; et d'un autre côté la souffrance est impie (je ne dis pas la mort, je dis la souffrance). Bien que les animaux inférieurs soient sans doute moins sensibles que l'homme, ils méritent la pitié. Ce ne sera que par des cotes mal taillées qu'on pourra s'en tirer ; le biologiste ne doit entreprendre, même in anima vili, que des expériences réellement utiles ; il y a aussi très souvent des moyens de réduire la douleur à son minimum ; il doit s'en servir. Mais, à cet égard, on doit s'en rapporter à sa conscience ; toute intervention légale serait inopportune et un peu ridicule ; le Parlement peut tout, dit-on en Angleterre, excepté changer un homme en femme ; il peut tout, dirai-je, excepté rendre un arrêt compétent en matière scientifique. Il n'y a pas d'autorité qui puisse édicter des règles pour décider si une expérience est utile."

 

Henri Poincaré, Dernières pensées, 1913, chapitre VIII, Flammarion, 1926, p. 234-235.



  "Darwin raconte l'histoire de ce chien qui léchait la main de l'homme qui opérait sur lui une vivisec­tion. Peut-on se représenter, par empathie, ce que représente, sur la durée, la solitude, la souffrance, le silence d'un animal de laboratoire ?
  L'expérimentation animale devrait se régler sur la déontologie dite des trois R. Le remplacement, quand il est possible, qui consiste à substituer à des espè­ces sensibles des espèces non sensibles, ou à mener les expériences in vitro ; la réduction, à défaut de remplacement, qui consiste à limiter le nombre des expériences sur les animaux sensibles aux seules expériences considérées comme indispensables ; le raffinement qui vise à diminuer, autant que possible, la souffrance infligée. Mais, malgré la création de comités d'éthique pour l'expérimentation animale, les chercheurs supportent mal qu'on les contrôle.

  En tout cas, il faudrait éliminer les expérimenta­tions qui ne sont pas de l'ordre des recherches fondamentales et thérapeutiques."

 

Elisabeth de Fontenay, "Abécédaire", 2009, in Qui sont les animaux ?, Folio essais, 2010, p. 34.

 

 


Date de création : 15/01/2013 @ 10:33
Dernière modification : 26/01/2022 @ 16:34
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