"Dans la jalousie non plus, le moi ne s'affirme pas ; c'est un sentiment qui dépersonnalise et c'est là peut-être ce qui le distingue avant tout de l'amour-propre et de l'orgueil. L'homme est touché dans son amour-propre, en constatant qu'il est le second et non le premier ; c'est avec soi-même qu'il doit liquider cette situation pénible, la personne du concurrent ne jouant, au fond, qu'un rôle secondaire ; dans la jalousie, c'est l'inverse qui se produit : nous souffrons de ce que l'autre est le premier et de ce que nous-même nous n'occupons que la seconde place ; l'accent tombe sur la personne de « l'autre », à la place duquel on voudrait être. Aussi l'amour-propre fait-il naître le désir de conquête, la jalousie, au contraire, provoque celui de vengeance et de destruction."
Eugène Minkowski, Le Temps vécu, 1933, PUF, 1995, p. 251.