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Texte à méditer :   Un peuple civilisé ne mange pas les cadavres. Il mange les hommes vivants.   Curzio Malaparte
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Hors des sentiers battus
L'image comme signe

  "Si l'espace ne contient pas les choses ; si ce sont les choses qui, par leurs déplacements ou leurs rapports, définissent l'espace ; si l'on comprend ainsi comment la découverte de nouvelles structures intellectuelles reflétant des aspects encore inconnus de l'activité universelle, engendre de nouvelles formes plastiques ; si l'on admet donc que le progrès de l'esprit humain consiste dans la création de nouveaux objets aussi bien figuratifs qu'utilitaires, on ne doit pas oublier que l'image – l'objet plastique – n'est jamais un double du réel. L'analyse filmologique doit nous conduire, dans ce domaine, à de nouveaux et immenses progrès dans la connaissance des lois de la création intellectuelle.
  Dans l'image fixe, les traits, choisis et rassemblés, simultanément sur l'écran plastique, appellent nécessairement l'unité des mesures spatiales. Dans l'image mobile, les traits choisis mais présentés successivement à l'esprit appellent une unité supérieure de mesure qui est nécessairement temporelle. C'est à quoi correspond d'abord le rythme fondamental du renouvellement des images à une allure adaptée à la rapidité d'impression de la rétine par le monde extérieur – par quoi se trouve établie la notion du continu spatial, qui ne suffit pas, cependant comme on l'a déjà remarqué, à expliquer l'illusion filmique.

  En fait, ce qui apparaît sur l'écran, ce sur quoi travaille notre esprit, ce n'est pas le réel, c'est un signe. La grande erreur qu'on commet habituellement est d'aborder l'étude du film comme si le spectacle cinématographique nous mettait en présence d'un double de la réalité. Il ne faut jamais oublier que le film est constitué d'images, c'est-à-dire d'objets fragmentaires limités et fugitifs comme tous les objets. Ce qui se matérialise sur l'écran ce n'est ni le réel, ni l'image qui s'est formée dans le cerveau du cinéaste, ni l'image qui se forme dans notre cerveau, c'est un signe au sens propre du terme. Il n'est réel qu'en ce qu'il possède une existence matérielle encore qu'artificielle. Il en est de l'image filmique comme de celle que fournit par exemple le radar. Des systèmes de points produits par des vibrations, forment, sur un écran, des taches qui, en soi, ne sont ni équivalentes à la figure de la terre ni pourvues de valeurs significatives absolues. C'est une pure illusion que d'attribuer à l'image plastique une essence distincte de celle qui permet les autres langages représentatifs, idéographiques ou alphabétiques. Il y a, dans tous les cas, apparition ou formation d'une image virtuelle, intermédiaire entre celle qui est dans l'esprit de celui qui parlé et celle qui se forme dans l'esprit de celui qui écoute ou regarde – ce qui est la même chose. Cette image possède une réalité physique positive et cette réalité la fait correspondre non pas à la nature mais aux structures mentales de certains groupes sociaux, de certains hommes. Elle constitue une sorte de relais sensible, nécessaire dans tous les cas où un lien se crée entre les hommes. Elle ne peut pas ne pas nous révéler des choses essentielles sur la structure temporelle et permanente de l'esprit, aussi bien que sur celle du monde physique où se meuvent les participants d'un art déterminé."

 

Pierre Francastel, "Espace et illusion", 1949, in L'Image, la vision et l'imagination, Denoël/Gonthier, 1983, p. 188-189.

 

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Date de création : 03/09/2024 @ 07:15
Dernière modification : 03/09/2024 @ 07:15
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