* *

Texte à méditer :  La solution du problème de la vie, c'est une manière de vivre qui fasse disparaître le problème.  Wittgenstein
* *
Figures philosophiques

Espace élèves

Fermer Cours

Fermer Sujets de dissertation et textes

Fermer Méthodologie

Fermer Classes préparatoires

Espace enseignants

Fermer Sujets de dissertation et textes

Fermer Elaboration des cours

Fermer Exercices philosophiques

Fermer Auteurs et oeuvres

Fermer Méthodologie

Fermer Ressources en ligne

Fermer Agrégation interne

Hors des sentiers battus
Juger et percevoir

  "Apercevoir, c'est sentir ; comparer, c'est juger ; juger et sentir ne sont pas la même chose. Par la sensation, les objets s'offrent moi séparés, isolés, tels qu'ils sont dans la nature ; par la comparaison, je les remue, je les transporte pour ainsi dire, je les pose l'un sur l'autre pour prononcer sur leur différence ou sur leur similitude, et généralement sur tous leurs rapports. Selon moi la faculté distinctive de l'être actif ou intelligent est de pouvoir donner un sens à ce mot est. Je cherche en vain dans l'être purement sensitif cette force intelligente qui superpose et puis qui prononce : je ne la saurais voir dans sa nature. Cet être passif sentira chaque objet séparément, ou même il sentira l'objet total formé des deux ; mais, n'ayant aucune force pour les replier l'un sur l'autre, il ne les comparera jamais, il ne les jugera point."

 

Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l'éducation, 1762, Livre IV, "Profession de foi du vicaire savoyard", GF, 1966, p. 351.


 

  "Toutes les opérations de l'esprit se réduisent à l'observation des ressemblances et des différences, des convenances et des disconvenances que les divers objets ont entre eux et avec nous. La justesse de l'esprit dépend de l'attention plus ou moins grande avec laquelle on fait ces observations.
  Veux-je connaître les rapports de certains objets entre eux ? que fais-je ? je place sous mes yeux, ou rends présents à ma mémoire, plusieurs ou du moins deux de ces objets ; ensuite je les compare. Mais qu'est-ce que comparer ? C'est observer alternativement et avec attention l'impression différente que font sur moi ces deux objets présents ou absents. Cette observation faite, je juge, c'est-à-dire je rapporte exactement l'impression que j'ai reçue. Ai-je, par exemple, grand intérêt de distinguer entre deux nuances presque imperceptibles de la même couleur laquelle est la plus foncée ? j'examine longtemps et successivement les morceaux de draps teints de ces deux nuances ; je les compare, c'est-à-dire je les regarde alternativement. Je me rends très attentif à l'impression différente que font sur mon œil les rayons réfléchis des deux échantillons, et je juge enfin que l'un est plus foncé que l'autre, c'est-à-dire, je rapporte exactement l'impression que j'ai reçue : tout autre jugement serait faux. Tout jugement n'est donc que le récit de deux sensations, ou actuellement éprouvées, ou conservées dans ma mémoire.

  Lorsque j'observe les rapports des objets avec moi, je me rends pareillement attentif à l'impression que j'en reçois. Cette impression est agréable ou désagréable. Or, dans l'un ou l'autre cas, qu'est-ce que juger ? C'est dire ce que je sens. Suis-je frappé à la tête ? la douleur est-elle vive ? le simple récit de la sensation que j'éprouve forme mon jugement.
  Je n'ajouterai qu'un mot à ce que je viens de dire ; c'est qu'à l'égard des jugements portés sur les rapports que les objets ont entre eux ou avec nous, il est une différence qui, peu importante en apparence, mérite cependant d'être remarqués. Lorsqu'il s'agit de juger du rapport des objets entre eux, il faut pour cet effet en avoir au moins deux sous les yeux. Mais, si je juge du rapport d'un objet avec moi, il est évident, puisque tout objet peut exciter une sensation, qu'un seul suffit pour produire un jugement.
  Je conclus de cette observation que toute assertion sur le rapport des objets entre eux suppose comparaison de ces objets, toute comparaison une peine, toute peine un intérêt puissant pour se la donner ; et qu'au contraire, lorsqu'il s'agit du rapport d'un objet avec moi, c'est-à-dire d'une sensation, cette sensation, si elle est vive, devient elle-même l'intérêt puissant qui me force à l'attention. Toute sensation de cette espèce emporte donc toujours avec elle un jugement. Je ne m'arrêterai pas davantage à cette observation, et répéterai, d'après ce que j'ai dit ci-dessus, que, dans tous les cas, juger est sentir."

 

Claude-Adrien Helvétius, De l'homme, 1772, section II, chapitre IV, Œuvres complètes d'Helvétius, P. Didot, 1795, tome 7, p. 181-185.

 

Retour au menu sur juger

 

Retour au menu sur la perception

 


Date de création : 18/09/2025 @ 11:30
Dernière modification : 20/09/2025 @ 16:33
Catégorie :
Page lue 380 fois


Imprimer l'article Imprimer l'article

Recherche



Un peu de musique
Contact - Infos
Visites

   visiteurs

   visiteurs en ligne

^ Haut ^