"Une loi n'est jamais faite que pour une période ou un régime déterminé. Elle s'adapte aux circonstances qui l'ont motivée et ne peut aller au-delà. Elle ne se conçoit qu'en fonction de sa nécessité ou de son utilité ; aussi, une bonne loi ne doit pas être intangible, car elle ne vaut que pour le temps qu'elle a voulu régler. La théorie peut envisager des abstractions. La loi, œuvre essentiellement pratique, ne s'applique qu'à des situations essentiellement concrètes. C'est ce qui explique que si la jurisprudence peut étendre l'application d'un texte, il y a à cette extension des limites, et que celles-ci se trouvent atteintes chaque fois qu'à la situation qu'avait envisagée l'auteur de la loi, viennent s'en substituer d'autres, en dehors de ses prévisions.
Une loi – constitution ou loi ordinaire – ne statue donc jamais que pour des périodes normales, pour celles qu'elle peut prévoir.
Œuvre de l'homme, elle est soumise, comme toutes les choses humaines, à la force des choses, à la force majeure, à la nécessité.
Or, il est des faits que la sagesse humaine ne peut prévoir, des situations qu'elle n'a pu envisager et dans lesquelles la norme étant devenue inapplicable, il faut, comme on pourra, en s`écartant le moins possible des prescriptions légales, parer aux brutales nécessités de l'heure et opposer des moyens de fortune à la force invincible des événements."
André Vanwelkenhuyzen, "De quelques lacunes du droit constitutionnel belge", 1968, in Le Problème des lacunes en droit, Émile Bruylant, 1968, p. 348-349.
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