"Il ne faut pas oublier que le jardin, étonnante création maintenant millénaire, avait en Orient des significations très profondes et comme superposées. Le jardin traditionnel des Persans était un espace sacré qui devait réunir à l'intérieur de son rectangle quatre parties représentant les quatre parties du monde, avec un espace plus sacré encore que les autres, qui était comme l'ombilic, le nombril du monde en son milieu (c'est là qu'étaient la vasque et le jet d'eau) ; et toute la végétation du jardin devait se répartir dans cet espace, dans cette sorte de microcosme. Quant aux tapis, ils étaient à l'origine des reproductions de jardins : (le jardin, c'est un tapis où le monde tout entier vient accomplir sa perfection symbolique, et le tapis, c'est une sorte de jardin mobile à travers l'espace). Le jardin, c'est la plus petite parcelle du monde et puis c'est la totalité du monde. Le jardin c'est, depuis le fond de l'antiquité, une sorte d'hétérotopie heureuse et universalisante (de là nos jardins zoologiques)."
Michel Foucault, "Des espaces autres", conférence prononcée le 14 mars 1967 à Paris, in Dits et Écrits : 1954-1988, Volume 4, Gallimard, 1994, p. 752-762.
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