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Texte à méditer :  L'histoire du monde est le tribunal du monde.
  
Schiller
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Hors des sentiers battus
L'histoire de la philosophie

  "[…] pour le philosophe, l'histoire apparaît à son tour comme une science auxiliaire de la pensée ; elle ne suffit à rien, mais il est maladroit de se passer de ses services. Elle apprend au philosophe à élargir son horizon, à prendre conscience de la complexité des problèmes et de leurs implications, lui propose des solutions – ou des objections – qu'il n'aurait peut-être pas imaginées ni prévues, elle l'arrache à l'étroitesse inévitable qu'implique l'isolement et l'intègre à la plus vaste société des esprits, par un dialogue toujours enrichissant.
  C'est ce qu'exprimait déjà Sénèque dans une belle page, chère à l'humaniste : « aucun siècle ne nous est interdit ; (par l'histoire) la puissance de notre esprit peut franchir les limites de la faiblesse de l'homme seul, egredi humanae imbecillitatis angustias. Nous pouvons discuter avec Socrate, douter avec Carnéade, connaître la tranquillité d'Épicure, avec les Stoïciens vaincre la nature humaine, la dépasser avec les Cyniques. Puisque la structure de l'être (rerum natura) nous permet d'entrer en communion avec tout le passé, pourquoi ne pas nous arracher à l'étroitesse de notre temporalité première et partager avec les meilleurs esprits ces vérités magnifiques et éternelles », quae immensa, quae aeterna sunt[1] ?

 

Henri-Irénée Marrou, De la connaissance historique, 1954, Paris, Points Histoire, 1975, p. 250.

[1] De breuitate vitae, 14, 1-2.


 

  "L'opposition de la philosophie et de son histoire ne se réduit pas à celle de deux concepts : elle se découvre aujourd'hui dans la difficulté concrète éprouvée par quiconque se propose de devenir philosophe. Ce que nous savons des tentatives passées ne peut, en effet, que nous inviter à considérer tout nouveau projet comme vain. L'exigence philosophique est exigence d'un savoir rigoureux, comportant démonstrations et preuves, pouvant donc se communiquer, s'imposer à tous, et permettant d'atteindre, en une totale certitude, la vérité. Or, l'histoire nous apprend qu'une telle exigence, dans la mesure où elle est parvenue à se satisfaire, a toujours abouti à la constitution de « philosophies », c'est-à-dire, en fait, à la formulation d'hypothèses sur la Nature et sur l'Homme, hypothèses relativement cohérentes à l'intérieur de chaque système, mais apparaissant, dès qu'on les considère en des systèmes divers, comme opposées et contradictoires.
  Nulle philosophie, quelles que soient sa richesse et sa profondeur, ne semble répondre au projet qui l'engendra, et qui fut projet de constituer, non certes une philosophie parmi d'autres, mais vraiment la philosophie comme pensée de la Vérité.
  La réussite de tout projet philosophique est donc échec encore. Descartes, rompant avec toutes les philosophies du passé, a cru formuler un corps de doctrine fondé en certitude. Mais le cartésianisme, malgré la rigueur de son ordre, a été, aussitôt, contesté. Kant a prétendu jeter les fondements de toute « métaphysique future voulant se constituer comme science ». Mais les métaphysiques qui ont succédé à la philosophie kantienne n'ont eu nul souci de ses normes. Peut-on espérer réussir là où ont échoué de tels philosophes ? Husserl l'espéra, entreprenant de fonder enfin, par la phénoménologie, la philosophie comme science rigoureuse. Et Bergson, estimant que tous les échecs des philosophies précédentes tenaient à ce que l'on y pensait le vrai selon l'éternel, crut découvrir l'authentique réalité dans l'intuition de la durée créatrice. Mais phénoménologie et bergsonisme sont seulement venus, à leur tour, enrichir la liste des philosophies constituées. De même que la liberté, évidente pour celui qui agit, ne peut plus être retrouvée par celui qui pense l'acte, et paraît alors n'avoir été, au sein de l'acte, qu'illusion subjective, de même l'assurance qu'a chaque philosophe de pouvoir atteindre la vérité, si elle est l'âme de son projet, semble ne pouvoir, à la réflexion, être tenue que pour illusoire."

 

Ferdinand Alquié, "Le savoir philosophique", Encyclopédie française, Paris, Société nouvelle de l'Encyclopédie française, 1957, t. XIX.

 

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Date de création : 11/11/2014 @ 15:12
Dernière modification : 15/12/2014 @ 09:04
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