* *

Texte à méditer :  Aucune philosophie n'a jamais pu mettre fin à la philosophie et pourtant c'est là le voeu secret de toute philosophie.   Georges Gusdorf
* *
Figures philosophiques

Espace élèves

Fermer Cours

Fermer Méthodologie

Fermer Classes préparatoires

Espace enseignants

Fermer Sujets de dissertation et textes

Fermer Elaboration des cours

Fermer Exercices philosophiques

Fermer Auteurs et oeuvres

Fermer Méthodologie

Fermer Ressources en ligne

Fermer Agrégation interne

Hors des sentiers battus
Résumés sur le monde des passions

Résumé alpha : Étienne Borne, Le Problème du mal, 1958, Chapitre V.

Résumé n° 1 : Ferdinand Alquié, Le désir d'Éternité, 1943, PUF, 1987, p. 17-20.

Résumé n° 2 : André Comte-Sponville, Présentations de la philosophie, 2000, Albin Michel, p. 51-55.

Résumé n° 2' : Jean-Didier Vincent, Biologie des passions, 1986, Odile Jacob, p. 13 et 17-18.

Résumé n° 3 : D'Holbach, La Morale universelle ou Les Devoirs de l'homme fondés sur la nature, 1776, II, 11.

 

Texte à résumer en 130 mots (± 10 %) :

  "Le devoir, inséparable d'une attitude polémique contre le mal, c'est-à-dire de débat et de combat avec le monde et les hommes, trouve sa vérité philosophique et concrète dans la passion. Rien ne trahit plus le cœur humain que la réduction de la vie morale à une lutte de la raison contre les passions en vue de la possession d'une sagesse paisible. Ôtée la passion, il ne resterait de l'homme qu'une plate caricature, une ombre sur un mur. L'immoralité lorsqu'elle va jusqu'au bout d'elle-même poursuit la même dégradation : le propre du vice est d'être sans passion, comme un rituel et une mécanique. L'Enfer est le désert de la passion et il faudrait le dire de glace et non de feu. L'homme entre en immoralité lorsqu'il organise la fuite devant la passion, comme l'avouent si elles sont correctement interrogées les trois figures essentielles du mal humain, le dilettantisme, l'avarice, le fanatisme. Les décrire serait la tâche d'une phénoménologie morale ; on se contentera de les analyser brièvement comme autant de philosophies en action.
  Le dilettantisme est un don juanisme du cœur, des sens et de l'esprit. Rendez-vous élégant de tous les humanismes et de toutes les cultures, produit précieux des civilisations décadentes par excès de richesses, le dilettantisme est monstrueusement intelligent, il excelle à montrer la relativité et le mélange indéfinis du bien et du mal dans les intentions et les actions humaines, il se garde de la partialité et de l'engagement comme d'une grossière faute de goût, il se réclame des apparences successives et contradictoires de la nature et de l'histoire. Le dilettante pratique une technique d'évanouissement du mal qui fait du monde un beau mensonge. Parce qu'il refuse la passion, l'accès à l'existence lui est interdit. Parce qu'il a peur de prendre le mal au sérieux dans l'angoisse, toute réalité et la sienne propre deviennent de purs possibles sans substance. Le dilettante ne vit pas, il a l'air de vivre.
  L'avarice, en dépit d'un lieu commun tenace, n'est pas une passion. Ne pas vouloir dépendre, s'enfermer dans un système de sécurité, chercher une expérience de parfaite suffisance à soi, c'est l'avarice même et le contraire de la passion qui est l'épreuve continue d'une vulnérabilité à autrui. L'avare vrai est Gobseck et non pas Harpagon, ce timide, inconséquent et comique apprenti. L'avare intégral entasse l'argent pour ne rien devoir à personne et pour avoir entre ses mains l'infaillible solution de tous les problèmes, pour constamment se retirer et dominer sans le faste puéril du pouvoir visible, bref pour tenir toujours efficacement le mal à distance. L'argent n'est qu'un moyen d'y parvenir, plus vivement symbolique, parmi beaucoup d'autres. Le pharisaïsme, ce respect littéral de la loi, qui demande austérité et vertu réelles, est une technique sûre de préservation du péché et par conséquent une forme d'avarice et une même carence de passion. L'avare est toujours ce prudent, ce vertueux qui a la morale avec lui et qui a su se séparer du mal. Incapable de reconnaissance, il se perd dans une ingratitude de dimensions métaphysiques, parce qu'il n'a pas voulu s'engager dans la passion qui dissout les sécurités et dans le risque s'ouvre à l'espérance.
  Le dilettante et l'avare étaient des êtres de solitude, des hommes psychologiques ; le fanatique est un être de communauté, un homme foncièrement sociologique. Le dilettantisme était une esthétique universelle, l'avarice un absolu de morale, le fanatisme est une religion politique qui entend résoudre dans l'histoire le problème du mal par des techniques d'écrasement et d'extirpation radicale. Il professe une doctrine de salut par la nation, la classe ou le parti. Le fanatique est aussi bien esclave terroriste que maître despotique : c'est le même esprit de tyrannie, le même manichéisme qui ne supporte pas le partage des valeurs, le dialogue des expériences et qui a besoin pour se rassurer sur le bien et le vrai d'une unification des consciences, impériale, charnelle, violente. Familier des procès d'hérésie, le fanatique poursuit à la fois le déshonneur, la réfutation et la mort de l'adversaire. Sa cruauté est le fruit d'une haine sans passion qui s'exerce légalement, mécaniquement, rituellement. Le fanatique réduit ses victimes à une condition anonyme, substitue à leur visage concret la définition abstraite de l'hérétique et du traître. Il résout le problème du mal par la destruction des méchants, comme on vient à bout d'une invasion de microbes et d'un vol de sauterelles. Mais dépersonnalisant l'esprit, perpétuant la guerre par sa mythologie de la dernière des guerres avant la victoire totale, il paraît parfois se confondre avec l'esprit du mal.
  Dilettantisme, avarice et fanatisme ne cessent d'ajouter au mensonge, à l'ingratitude, à la haine ; ils sont le mal parce que dès le départ ils ont refusé cette participation au mal dans l'angoisse qui est la seule voie vers la libération ; chacun d'eux est un système cohérent et fort de liquidation du mal, une solution intégrale du problème — et vécus ils aboutissent à une exaspération du mal. Il manque aux moralismes comme aux immoralismes de connaître que la passion est la substance de la vie ; ou plutôt ils n'en ont que trop conscience, tant sont savantes et habiles les précautions qu'ils prennent pour ne se point brûler à cette flamme.

  La passion sera alors pour la conscience morale critère d'authenticité. L'âme du devoir est ce prophétisme qui, depuis les temps de l'ancien Israël, se manifeste par la dénonciation des tyrannies et des servitudes, la protestation contre l'iniquité de la mort, la guerre aux idoles, c'est-à-dire au partage de Dieu en valeurs ennemies. Le dilettantisme oubliait, en moquant l'esprit de sérieux que la colère et l'indignation sont les premiers sentiments moraux. La conscience morale ne sera fidèle à sa propre essence que si elle ne renie pas ses origines. En ce premier sens et comme par enracinement, le devoir est déjà passion, ou dilettantisme vaincu."

 

Étienne Borne, Le Problème du mal, 1958, Chapitre V.

 

Corrigé proposé :

"Le devoir, ou la vie morale, ne consiste pas à se débarrasser des passions. Au contraire, c'est l'absence / de passion qui constitue le mal. En témoignent les trois figures du mal que sont le dilettante, l'avare et / le fanatique.
  Tandis que le dilettante ne prend pas au sérieux les passions, relativise le mal et croit ainsi le / faire disparaître, l'avare est quant à lui un être sans passion, accumulant l'argent comme moyen de se protéger / du mal. Le fanatique, enfin, veut détruire le mal, mais ce faisant, il incarne lui-même le mal. Ainsi, / tous les trois, pensant se débarrasser du mal, ne font que le renforcer.

  Être moral, ce n'est donc pas / nier les passions, mais les reconnaître sans en être l'esclave."

131 mots

 

Retour en haut de page


Texte à résumer en 100 mots (± 10 %) :

  "Les passions apparaissent à notre conscience comme des ruptures d'équilibre. L'homme normal porte son attention sur les divers objets qui s'offrent à ses sens, son esprit agite diverses pensées. Mais l'avare ne songe qu'à son or, le joueur qu'à son gain, l'amoureux qu'à celle qu'il aime. Tout ce qui n'est pas l'objet de sa passion paraît indifférent au passionné, tout ce qui touche ou lui rappelle cet objet fait naître en lui les émotions les plus vives : de là dépendent sa joie et son désespoir. De même, son intelligence ne s'emploie plus qu'à justifier la passion, ou à construire des plans qui la favorisent. Sa volonté n'a d'autre but que la servir.
  Or cette rupture d'équilibre est sentie par le moi comme subie. La passion ne nous semble pas exprimer notre personnalité profonde et libre, elle ne nous apparaît pas comme une volonté. Elle est souvent pénétrée de regret, de remords. La passion est le signe de notre dépendance. On peut donc se demander quelle dualité intérieure elle nous signifie. Comment un de nos états peut-il nous apparaître comme étranger et subi ? Car enfin, comme le remarque Descartes, « tout ce qui se fait ou qui arrive de nouveau est généralement appelé une passion au regard du sujet auquel il arrive, et une action au regard de celui qui fait qu'il arrive ». Action et passion ne diffèrent que par les sujets auxquels on les peut rapporter, et toute passion subie par nous doit être l'action de quelque autre chose. Si le choix passionnel ne nous apparaît pas comme étant notre choix, il doit émaner d'une réalité agissant en nous et sur nous, réalité intérieure à nous, et pourtant susceptible de nous contraindre.

  Penserons-nous que cette réalité soit notre corps ? Ici, le pur mental subirait l'organique, l'âme connaîtrait les passions du fait de son union avec le corps. Ainsi, selon Descartes, l'erreur que l'on commet en faisant jouer à l'âme « divers personnages qui sont ordinairement contraires les uns aux autres ne vient que de ce qu'on n'a pas bien distingué ses fonctions d'avec celles du corps, auquel seul on doit attribuer tout ce qui peut être remarqué en nous qui répugne à notre raison ». Descartes, on le voit, ne distingue pas les passions des autres états affectifs : plaisirs, douleurs, émotions. Mais il est dès lors difficile de comprendre que la passion comporte des choix délicats, se développe en fonction de situations subtiles, dépende, en un mot, de la compréhension de circonstances complexes, dont seul l'esprit peut découvrir le sens. L'avarice s'explique-t-elle sans la peur des lendemains, la jouissance de posséder, l'idée que l'on domine les hommes par la richesse ? Comment ne voir en tout ceci que les effets du corps, où l'on ne saurait trouver que des déplacements de matière ? La passion, supposant compréhension et synthèses, n'est intelligible que si l'on invoque l'esprit. C'est donc au sein de notre psychisme que paraît se situer la dualité passionnelle.
  Verra-t-on alors dans la passion, comme le font certains sociologues, l'effet du conflit entre conscience sociale et conscience individuelle ? On sait que Blondel tenait la volonté pour le fruit de l'influence exercée sur notre conduite par des impératifs sociaux. Mais on comprend mal ici pourquoi le moi s'identifie précisément avec le social, pourquoi l'ordre du groupe lui apparaît comme étant liberté, alors que l'individuel lui semble subi. Au reste, ne pouvons-nous avoir l'impression d'être nous-mêmes en agissant contre la règle, ne pouvons-nous, contre le social, nous insurger par volonté ?
  Il est donc difficile de définir la passion si l'on demeure sur le plan de la science, c'est-à-dire si l'on refuse de l'opposer à une volonté pure, puissance métaphysique de liberté qui, extérieure aux tendances, constituerait un moi par rapport auquel tout désir serait étranger. Aussi la psychologie ne parvient-elle jamais à distinguer clairement passion et volonté. D'autre part, elle considère la passion comme étant de l'ordre de l'activité, et y voit une tendance prédominante. Beaucoup de passions lui apparaissent même comme résultant de l'organisation de tendances multiples. D'autre part, elle ne peut tenir la volonté pour un pouvoir distinct des tendances, mais seulement pour la faculté d'agir en fonction du plus grand nombre, ou des plus fortes d'entre elles. La passion ne peut donc plus lui apparaître que comme un cas particulier de la volonté. La décision volontaire consacre la victoire de notre plus forte tendance, ou d'un ensemble de désirs dominants : mais notre tendance la plus forte, le système de nos désirs dominants ne sont-ils pas précisément nos passions ? Il semble même que, l'action normale laissant place à des considérations morales et sociales qui, le plus souvent, contrecarrent nos aspirations personnelles, la passion, qui néglige la morale et la société, apparaisse comme émanant de notre moi le plus profond, constitue la revanche de notre personnalité réelle. S'il en était ainsi, la passion serait essentiellement notre action.
  Pourtant il n'en est rien. La passion est subie, et notre conscience nous en avertit sans cesse. On déteste parfois son amour, et la Phèdre de Racine a pris « la vie en haine » et sa « flamme en horreur ». Pourra-t-on comprendre de tels états si l'on s'obstine à considérer la passion comme notre tendance la plus profonde ? Nous croyons au contraire que la prépondérance de la tendance passionnelle est illusoire, et que nos passions ne sont que nos erreurs. Le passionné s'abuse, ne tient compte que d'une partie de lui-même, oublie la plupart de ses désirs. Il sent même confusément cette partialité qui l'aveugle, et que pourtant il se refuse à tirer au clair. Les discours qu'il se tient à lui-même ne vont jamais sans quelque dissimulation. La passion est moindre conscience. L'ivrogne préfère la vie à l'alcool qui le tue, et pourtant il boit. Et c'est le bonheur qu'au plus profond de lui-même recherche l'amoureux : cependant son amour l'attache à ses souffrances. Il est donc vrai de dire que dans la passion, nous agissons contre notre raison : même si l'on refuse de reconnaître à la raison le pouvoir de poser des valeurs, si on la considère comme une pure faculté de connaissance, si l'on estime que toute valeur est relative à des tendances, la passion s'oppose à la raison : elle nous aveugle sur notre nature réelle, elle est ignorance de nous-mêmes."

 

Ferdinand Alquié, Le désir d'Éternité, 1943, PUF, 1987, p. 17-20.

 

Corrigé proposé :

  L'homme passionné perd son équilibre et se concentre entièrement sur l'objet de sa passion et, ce faisant, apparaît / comme privé de liberté.
  Est-ce parce que la passion est l'effet du corps ? C'est plutôt à l' / esprit qu'elle nous renvoie.

  Toutefois, elle ne peut pas plus, d'un point de vue sociologique, résulter du conflit / entre le social et l'individuel, qu'elle ne peut, d'un point de vue psychologique, être ramenée à notre / volonté [et à nos tendances profondes.]
  En vérité, toute passion est subie et, s'opposant à la raison, nous illusionne sur nous-même."

 

98 mots [103]

Retour en haut de page


  Vous résumerez le texte suivant en 100 mots (± 10 %) :

 

 "Qu'est-ce qu'éros ? C'est le manque, et c'est la passion amoureuse. C'est l'amour selon Platon : « Ce qu'on n'a pas, ce qu'on n'est pas, ce dont on manque, voilà les objets du désir et de l'amour. » C'est l'amour qui prend. Je t'aime : je te veux. C'est le plus facile. C'est le plus violent. Comment ne pas aimer ce qui manque ? Comment aimer ce qui ne manque pas ? C'est le secret de la passion (qu'elle ne dure que dans le manque, le malheur, la frustration) et de la religion (Dieu est ce qui manque absolument). Comment un tel amour, sans la foi, serait-il heureux ? Il lui faut aimer ce qu'il n'a pas, et souffrir, ou avoir ce qu'il ne désire plus (puisqu'il ne désire que ce qui manque) et s'ennuyer... Souffrance de la passion, tristesse des couples : il n'y a pas d'amour (éros) heureux.
    Mais comment serait-on heureux sans amour ? Et comment, quand on aime, ne le serait-on jamais ? C'est que Platon n'a pas raison sur tout, ni toujours. C'est que le manque n'est pas le tout de l'amour : il nous arrive aussi parfois, d'aimer ce qui ne nous manque pas – d'aimer ce que nous avons, ce que nous faisons, ce qui est –, et d'en jouir joyeusement, oui, d'en jouir et de nous en réjouir ! C'est ce que les Grecs appelaient philia, disons que c'est l'amour selon Aristote (« Aimer, c'est se réjouir ») et le secret du bonheur. Nous aimons ce qui ne nous manque pas, et cela nous réjouit, ou plutôt notre amour est cette joie même. Plaisir du coït et de l'action (l'amour qu'on fait), bonheur des couples et des amis (l'amour qu'on partage) : il n'y a pas d'amour (philia) malheureux.

    L'amitié ? C'est ainsi qu'on traduit ordinairement philia en français, ce qui n'est pas sans en réduire quelque peu le champ ou la portée. Car cette amitié-là, n'est exclusive ni du désir (qui n'est plus manque alors mais puissance), ni de la passion (éros et philia peuvent se mêler, et se mêlent souvent), ni de la famille (Aristote désigne par philia aussi bien l'amour entre les parents et les enfants que l'amour entre les époux : un peu comme Montaigne, plus tard, parlera de l'amitié maritale), ni de la si troublante et si précieuse intimité des amants... Ce n'est plus seulement ce que saint Thomas appelait l'amour de concupiscence (aimer l'autre pour son bien à soi) ; c'est l'amour de bienveillance (aimer l'autre pour son bien à lui) et le secret des couples heureux. Car on se doute que cette bienveillance n'exclut pas la concupiscence : entre amants, elle s'en nourrit au contraire, et l'éclaire. Comment ne pas se réjouir du plaisir qu'on donne ou qu'on reçoit ? Comment ne pas vouloir du bien à celui ou celle qui nous en fait ?
  Cette bienveillance joyeuse, cette joie bienveillante, que les Grecs appelaient philia, c'est l'amour selon Aristote, disais-je : aimer, c'est se réjouir et vouloir le bien de celui qu'on aime. Mais c'est aussi l'amour selon Spinoza : « une joie, disait-il, qu'accompagne l'idée d'une cause extérieure ». Aimer, c'est se réjouir de. C'est pourquoi il n'est d'autre amour, dans son principe, que joyeux. Le manque ? Ce n'est pas l'essence de l'amour : c'est son accident, quand le réel nous fait défaut, quand le réel nous blesse ou nous tue. Mais il ne nous blesserait pas si le bonheur d'abord, fût-ce en rêve, n'était là. L'amour n'est pas manque : l'amour est puissance et joie. Tous les amants le savent, quand ils sont heureux, et tous les amis. Je t'aime : je suis joyeux que tu existes.
    Agapé ? C'est encore un mot grec, mais très tardif. Ni Platon, ni Aristote, ni Épicure, d'un tel mot n'eurent jamais l'usage. Éros et philia leur suffisaient : ils ne connaissaient que la passion ou l'amitié, la souffrance du manque ou la joie du partage. Mais il se trouve qu'un petit juif, bien après la mort de ces trois-là, s'est mis soudain, dans une lointaine colonie romaine, dans un improbable dialecte sémitique, à dire des choses étonnantes : « Dieu est amour... Aimez votre prochain... Aimez vos ennemis... » Ces phrases, sans doute étranges dans toutes les langues, semblaient, en grec, à peu près intraduisibles. De quel amour pouvait-il s'agir ? Éros ? Philia ? Cela nous vouerait à l'absurdité. Comment Dieu pourrait-il manquer de quoi que ce soit. Être l'ami de qui que ce soit ? « Il y a quelque, ridicule, disait déjà Aristote, à se prétendre l'ami de Dieu ». De fait, on voit mal comment notre existence, si piètre, si dérisoire, pourrait augmenter l’éternelle et parfaite joie divine... Et qui pourrait décemment nous demander de tomber amoureux de notre prochain (c'est-à-dire de tout le monde et de n'importe qui!) ou d'être l'ami, absurdement, de nos ennemis ? Pourtant il fallait traduire cet enseignement en grec, comme on le ferait aujourd'hui en anglais, pour être compris du monde... Les premiers disciples de Jésus, car c'est bien sûr de lui qu'il s'agit, durent pour cela inventer ou populariser un néologisme, forgé à partir d'un verbe (agapan : aimer) qui n'avait pas de substantif usuel : cela donna agapè, que les Latins traduiront par caritas, et les Français, le plus souvent, par charité... De quoi s'agit-il ? De l'amour du prochain, pour autant que nous en soyons capables : de l'amour pour celui qui ne nous manque ni ne nous fait du bien (dont on n'est ni amoureux ni l'ami), mais qui est là, simplement là, et qu'il faut aimer en pure perte, pour rien, ou plutôt pour lui, quoi qu'il soit, quoi qu'il vaille, quoi qu'il fasse, et fût-il notre ennemi... C'est l'amour selon Simone Weil ou Jankélévitch, et le secret, si elle est possible, de la sainteté. On ne confondra pas cette aimable et aimante charité avec l'aumône ou la condescendance : il s'agirait bien plutôt d'une amitié universelle, parce que libérée de l'ego (ce qui n'est pas le cas de l'amitié simple : « parce que c'était lui, parce que c'était moi », dira Montaigne à propos de son amitié pour La Boétie), libérée de l'égoïsme, libérée de tout, et pour cela libératrice. Ce serait l'amour de Dieu, s'il existe (« O Théos agapé estin », lit-on dans la première épître de saint Jean : Dieu est amour), et ce qui s'en approche le plus, dans nos cœurs ou nos rêves, si Dieu n'existe pas."

 

André Comte-Sponville, Présentations de la philosophie, 2000, Albin Michel, p. 51-55.

Corrigé proposé :

 

Retour en haut de page


Vous résumerez le texte suivant en 100 mots (± 10 %) :

 

  " « D'aussi loin que je me souvienne, je n'ai jamais pensé qu'à ça », confiait, à l'approche de la mort, un philosophe contemporain connu pour l'austérité de ses mœurs. L'aveu rappelait que, malgré les arrangements de langage qui s'étaient succédés depuis les temps obscurs, l'homme n'avait cessé d'être « bêtement » l'esclave de ses « passions ». Si l'on additionnait chez lui le temps occupé à avoir faim, soif, à être éperdu de désir, à retenir ou à satisfaire un besoin de puissance, d'affection ou simplement de défécation, il ne lui resterait guère de loisir pour l'exercice exclusif des fonctions nobles de l'espèce, le langage et la pensée. Partageant avec ce philosophe une éducation fondée sur la présence constante du péché, nous avons découvert très tôt qu'on pouvait, comme l'indique Thomas d'Aquin, souffrir du contraste entre l'appétit intellectif, où se manifeste l'empire de la volonté, et l'appétit sensitif, sujet des humaines passions. Mais ces passions étaient-elles mauvaises comme le proclamaient une tradition morale violente venue des stoïciens ? Étaient-elles des maladies de l'âme qu'il s'agissait à tout prix d'extirper ? Ne retrouvait-on pas les sanctions de ce moralisme dans l'exil imposé aux passions par les docteurs dans les bas-fonds du cerveau et dans les marais des humeurs, laissant à l'exercice de la raison les nobles étendues du cortex, toujours plus vastes à mesure que l'évolution rapprochait la bête de l'ange ? Sommés de décliner notre appartenance aux « chargés de pensée » ou aux « chargés de passions » auprès d'un hypothétique ministère de la vie, nous avons choisi de nous réfugier dans l'énoncé de données biologiques et entrepris de ne rapporter des passions que ce qui concernait des observations recueillies en laboratoire. […]
  Ce faisant, il ne sera plus question […] que de faits expérimentaux ou d'observations recueillis pour la plupart chez des animaux. Nous ne manquerons pas ainsi de contrarier l'idée tenace selon laquelle l'instinct aveugle est l'apanage des animaux, en opposition avec l'intelligence des êtres humains. […]

  Même un être unicellulaire possède un certain degré de liberté entre les récepteurs de l'information à la surface de la cellule et les effecteurs situés à l'intérieur. L'évolution des espèces consiste en un accroissement progressif du nombre des intermédiaires entre les informations venues du monde et les effecteurs responsables des actions. Le degré de liberté de l'animal augmente avec le nombre de ces intermédiaires. Mais c'est parce que l'élément liquidien et les substances qu'il transporte introduisent une solution de continuité dans l'organisation des cellules, que cette liberté est possible. Notre approche des passions sera donc précédée d'une étude des humeurs, c'est-à-dire des milieux liquidiens de l'organisme et des substances qui, en leur sein, permettent la communication.
  Nous traiterons ainsi de ce que l'on appelle la constance du milieu intérieur. Le milieu intérieur est censé reconstituer autour des cellules les caractéristiques du milieu marin originel. Selon le principe de l'homéostasie, tout écart à la norme se traduit par la mise en jeu de mécanismes tendant à ramener la grandeur perturbée à sa dimension initiale. Dans ces conditions, les passions ne seraient qu'un rappel à la norme, une sorte de névrose du normal ; ce dernier serait un immobile référentiel fictif. En réalité, derrière l'impassibilité du milieu intérieur se cache un imbroglio de fausses constantes, toutes plus ou moins interdépendantes et chacune variable d'une espèce à l'autre, d'un individu à l'autre et au sein du même, selon le temps et les circonstances. On conçoit le volant d'inertie que peut offrir la perpétuelle agitation des humeurs du milieu intérieur à la souplesse opérationnelle du système nerveux ; le cerveau exposé à un tel remue-ménage ne risque-t-il pas d'en être la victime (y laisser son âme?). Pour s'en protéger, il a la possibilité d'organiser lui-même son désordre. Le cerveau-glande, par ses multiples sécrétions de neuro-hormones, se révèle grand maître des humeurs. Au même titre que le cerveau-machine, le cerveau humoral subit et agit, à la fois victime passionnée et ordinateur de sa propre passion.
  Une autre protection du cerveau est l'existence d'une barrière de sang et de méninges qui isole le milieu cérébral du reste du milieu intérieur ; une barrière percée de portes, voies de passage à des informations sélectives. Mais, en se repliant sur ses murs, le cerveau a entraîné avec lui les éléments du désordre périphérique. À côté de l'organisation rigoureuse des neurones en réseaux milliardaires de connections synaptiques, on peut soupçonner à l'intérieur du cerveau un double jeu de sécrétions hormonales modulant au gré d'humeurs diffuses le fonctionnement des grands ensembles neuronaux.
  Loin d'asservir l'homme, on voit bien que les passions participent à son affranchissement des contraintes du milieu. Retrouvant en cela la tradition des philosophes du XVIIe siècle, nous étudierons en dernier lieu le bon usage des passions qui traduit leur valeur adaptative. Descartes proclame dans l'article 211 des Passions de l'âme « [...] qu'elles sont toutes bonnes de leur nature et que nous n'avons rien à éviter que leur mauvais usage ou leur excès ». Loin de constituer une maladie, les passions, pourvu qu'elles demeurent, comme le dit Aristote, dans une « excellente moyenne », sont le propre de la vertu. Bien plus, de même qu'elles constituent la base de l'expérience de l'être, elles sont aussi la source de la communication entre les êtres."

 

Jean-Didier Vincent, Biologie des passions, 1986, Odile Jacob, p. 13 et 17-18.

 

Corrigé proposé :

 

  Les philosophes ont généralement considéré l'homme comme asservi à ses passions, opposant celles-ci à la raison et à / la morale.
  Cependant, qu'en est-il d'un point de vue purement biologique ? On constate alors qu'elles sont / à l'origine de la liberté inhérente à tout être vivant car, associées aux humeurs, elles permettent de maintenir l' / équilibre de l'organisme, le libérant ainsi des contraintes extérieures. Plus particulièrement, le cerveau ordonne le chaos des humeurs, corporelles / ou cérébrales, et donc ne fait pas que les subir.

  Les passions sont en définitive bénéfiques à l'homme, pour / peu qu'elles demeurent dans un juste milieu.

 

108 mots

Retour en haut de page


  Résumer en 200 mots le texte suivant. Un écart de 10% en plus ou en moins sera accepté. Indiquer par une barre bien nette chaque cinquantaine de mots, puis, à la fin du résumé, le total exact.

 

  "Les passions sont des effets naturels de l'organisation des hommes, et des idées qu'ils se font ou qu'on leur donne du bonheur : mais si l'homme est un être raisonnable et sociable, il doit avoir des idées vraies de son bien-être, et tacher de l'obtenir par des voies compatibles avec les intérêts de ceux auxquels la société l'unit. Un inconsidéré qui suit les impulsions aveugles de ses passions, n'est ni un être intelligent, ni un être sociable et doué de raison. L'être intelligent est celui qui prend de justes mesures pour obtenir son bonheur ; l'être sociable est celui qui concilie son bien-être avec celui de ses semblables ; l'être raisonnable est celui qui distingue le vrai du faux, l'utile du nuisible, et qui sait qu'il doit mettre un frein à ses désirs. L'homme n'est jamais ce qu'il doit être, s'il ne montre de la retenue dans sa conduite.
  La tempérance est dans l'homme l'habitude de contenir les désirs, les appétits, les passions nuisibles, soit à lui-même soit aux autres. Cette vertu, de même que toutes les autres, est fondée sur l'équité. Que deviendrait une société dans laquelle chacun se permettrait de suivre ses fantaisies les plus déréglées ? Si chacun pour son intérêt souhaite que ses associés résistent à leurs caprices, il doit reconnaître que les autres ont droit d'exiger qu'il contienne les siens dans les bornes prescrites par l'intérêt général. D'un autre côté si, comme on l'a dit plus haut, l'homme isolé lui-même doit, en vue de sa conservation et de son bonheur durable, refuser de satisfaire ses appétits désordonnés, il y est encore plus obligé dans la vie sociale, où ses actions influent sur un grand nombre d'êtres qui réagissent sur lui-même. Si les excès du vin sont capables de nuire à tout homme qui s'y livre, ils lui nuiront encore bien plus dans la société, où ces excès l'exposent au mépris, et peuvent en troublant sa raison le porter à des actions punissables par les lois. Quelques moralistes sévères, pour rendre l'homme tempérant, lui ont prescrit un divorce total avec tous les plaisirs, et même lui ont ordonné de les haïr, de les fuir. Des maximes si dures mettraient l'homme dans une guerre continuelle contre sa propre nature, et sembleraient se proposer d'en faire un misanthrope ennemi de lui-même, et désagréable à la société. Les appétits de l'homme doivent être, sans doute, réglés par la raison ; tout lui prouve qu'il est des plaisirs dont il doit se priver pour son propre avantage, et cela par la crainte des conséquences, souvent terribles, qu'ils pourraient avoir pour lui-même et pour ses associés. C'est contre les séductions des plaisirs de cette espèce, que l'être sociable doit se mettre en garde ; c'est contre des passions injustes et criminelles, qu'il doit apprendre à combattre sans cesse, afin de contracter l'habitude d'y résister. L'habitude en effet nous rend faciles des choses qui d'abord nous paraissaient impossibles. Un des principaux objets de l'éducation devrait être d'accoutumer de bonne heure les hommes à résister aux impulsions inconsidérées de leurs désirs, par la crainte des effets qui peuvent en résulter. La tempérance a pour principe la crainte de déplaire aux autres et de se nuire à soi-même : cette crainte, rendue habituelle, suffit pour contrebalancer les efforts des passions qui peuvent nous solliciter au mal. Tout homme qui ne serait point susceptible de crainte, ne pourrait guère réprimer les mouvements de son cœur. Nous voyons que les hommes exempts de crainte par le privilège de leur état, sont communément les plus nuisibles à la société. Une crainte juste et bien fondée des êtres qui nous environnent, et dont nous sentons le besoin pour notre propre félicité, constitue l'homme vraiment sociable et lui fait un devoir de la tempérance. C'est par elle qu'il s'habitue à réprimer les effervescences subites de la colère ou de la haine pour les objets qui mettent quelques obstacles à ses désirs. C'est par elle qu'il apprend à se refuser aux plaisirs déshonnêtes, c'est-à-dire, qui le rendraient odieux ou méprisable à la société. C'est par elle qu'il résiste aux séductions de l'amour, cette passion qui produit tant de ravages parmi les hommes. La chasteté, qui résiste aux désirs déréglés de l'amour, est une suite de la tempérance ou de la crainte des effets de la volupté. La passion naturelle qui porte un sexe vers l'autre, est une des plus violentes dans un très-grand nombre d'hommes ; mais l'expérience et la raison font connaître les dangers de s'y livrer. Les lois de presque toutes les nations, les opinions de la plupart des peuples policés, conformes en ce point à la nature et à la droite raison, ont mis des entraves à l'amour déréglé, pour prévenir les désordres qu'il causerait dans la société. C'est d' après les mêmes idées que la continence absolue, le célibat, le renoncement total aux plaisirs même légitimes de l'amour, ont été admirés comme des perfections, comme les efforts d'une vertu surnaturelle. Les pensées enflamment les désirs, échauffent l'imagination, donnent de l'activité à nos passions. D'où il suit que la tempérance nous prescrit de mettre un frein même à nos pensées, de bannir de notre esprit celles qui peuvent nous rappeler des idées déshonnêtes, capables d'irriter nos passions pour les objets dont l'usage nous est interdit. Il est certain qu'en méditant sans cesse le plaisir qu'un objet peut nous causer ou que l'imagination nous exagère, nous ne faisons qu'attiser nos désirs, leur donner de nouvelles forces, les rendre habituels, les changer en des besoins impérieux que l'on ne peut dompter la tempérance, dit Démophile, est la vigueur de l'âme. Elle suppose la force, qui mérita toujours la considération des hommes. Ces réflexions, confirmées par l'expérience, nous doivent découvrir l'utilité de la pudeur. On peut la définir, la crainte d'allumer en soi-même ou dans les autres des passions dangereuses, par la vue des objets capables de les exciter. Quelques penseurs ont cru que le sentiment de la pudeur n'avait pour base que le préjugé, les conventions des hommes, les usages des peuples policés. Mais en regardant la chose de près, on sera forcé de reconnaître que la pudeur est fondée sur la raison naturelle, qui nous montre que si la volupté et la débauche sont capables de produire des ravages dans la société, il est évidemment démontré que l'intérêt de la société demande que l'on voile avec soin les objets faits pour éveiller des désirs criminels. Si l'on nous cite l'exemple des sauvages qui vont tout nus, et qui n'ont aucune idée de la pudeur, nous dirons que les sauvages sont des hommes que leur raison peu cultivée ne doit aucunement faire prendre pour modèles. L'impudent Diogène lui-même disait que la pudeur est la couleur de la vertu. Par la même raison la tempérance, qui met un frein à nos pensées et à nos actions, nous prescrit d'en mettre à nos paroles, nous interdit les discours déshonnêtes, condamne ces écrits obscènes dont l'effet nécessaire est d'alarmer la pudeur, de présenter des images lascives, capables d' allumer les passions des hommes.
  Ce fut évidemment pour habituer les hommes à la tempérance que le cynisme et le stoïcisme ont engagé leurs sectateurs à se priver des plaisirs et des commodités de la vie. Sur le même principe Pythagore prescrivit un silence rigoureux à ses disciples. Enfin c'est pour affaiblir les passions des hommes que quelques religions ont prescrit des abstinences, des jeûnes, des mortifications, dont le but était visiblement d'habituer à la tempérance, d'accoutumer à se priver des choses capables d'enflammer les passions. Si ces préceptes ont été quelquefois outrés par quelques législateurs bizarres, ils partaient au moins d'un principe raisonnable. La médecine ne nous montre-t-elle pas dans la diète ou le jeûne, le remède le plus sûr contre un grand nombre de maladies ? L'abstinence totale du vin, ordonnée par l'alcoran, si elle était plus fidèlement observée, exempterait les musulmans d'un grand nombre d'accidents auxquels l'ivrognerie si commune expose les habitants de nos contrées. Les vertus portées à l'excès cessent d'être des vertus, et deviennent des folies : les idées de perfection, poussées trop loin, sont fausses dès qu'elles nous invitent à nous détruire ; elles sont alors des effets de l'orgueil qui prétend s'élever au-dessus de la nature humaine, ou d'une imagination en délire. La vraie tempérance est accompagnée de la modération  qui nous fait éviter les excès en tous genres. La vraie morale, toujours guidée par la raison et la prudence, prescrit à l'homme de vivre suivant sa nature et de ne point prétendre s'élever au-dessus d'elle : elle sait que des préceptes trop rigoureux sont inutiles pour le plus grand nombre des mortels, et ne tendent qu'à faire des enthousiastes orgueilleux ou des fourbes hypocrites. Les joghis ou pénitents de l'Inde sont des fourbes, et non des hommes tempérants. Le fanatique qui fait consister la perfection à s'affaiblir, ou à se détruire peu-à-peu, devient un membre inutile de la société."

 

D'Holbach, La Morale universelle ou Les Devoirs de l'homme fondés sur la nature, 1776, II, 11.

Corrigé proposé :

 

Retour en haut de page


Date de création : 16/09/2015 @ 10:31
Dernière modification : 15/11/2021 @ 10:17
Catégorie :
Page lue 15171 fois


Imprimer l'article Imprimer l'article

Recherche



Un peu de musique
Contact - Infos
Visites

   visiteurs

   visiteurs en ligne

^ Haut ^