"Il est particulièrement décourageant pour un individu, et plus encore pour une classe, d'être laissé hors de la constitution, d'en être réduit à plaider sa cause à la porte des arbitres de sa destinée, sans pouvoir participer à la consultation. L'effet dynamisant de la liberté sur le caractère n'atteint son niveau maximal que lorsque la personne en question est soit dotée des mêmes privilèges de la citoyenneté que les autres, soit en passe de l'être. Est même plus importante encore que cette question de sentiment la discipline pratique que les citoyens acquièrent, au niveau de leur caractère, lorsqu'ils sont appelés occasionnellement, pour un temps et chacun à leur tour, à exercer quelque fonction sociale. On ne prend pas suffisamment en compte que, dans la vie ordinaire de la plupart des hommes, rares sont les occasions d'élargir leurs visions et leurs sentiments. Leur travail n'est que routine ; commandé non par l'amour mais par la forme la plus élémentaire de l'intérêt personnel, soit la satisfaction des besoins quotidiens; ni l'objet de ce travail ni le processus lui-même n'ouvrent l'esprit sur des pensées ou des sentiments qui les portent au-delà d'eux- mêmes. S'ils ont à portée de main des livres instructifs, rien ne les conduit à les lire ; et le plus souvent, l'individu n'a pas accès à quelque personne ayant une culture supérieure à la sienne. Lui donner une tâche à accomplir pour le public corrige dans une certaine mesure toutes ces déficiences. Si les circonstances permettent que soit considérable la somme des devoirs publics qui lui sont assignés, cela fera de lui un homme éduqué."
John Stuart Mill, Considérations sur le gouvernement représentatif, 1861, Chapitre III.
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