"Simplicio : Le fondement principal de l'argumentation d'Aristote est a priori : c'est en vertu de ses principes physiques, évidents et clairs, qu'il montre la nécessité de l'inaltérabilité du ciel ; il établit la même chose ensuite a posteriori, en s'appuyant sur le sens et sur les traditions des anciens.
Salviati : Ce que vous exposez là, c'est la méthode qu'il a suivie en écrivant sa doctrine, mais je ne crois pas que ce soit celle de sa recherche : je tiens fermement que d'abord, par les sens, les expériences et les observations, il a tenté de s'assurer de la conclusion le plus possible ; ensuite il a cherché les moyens de la démontrer, parce que c'est ainsi qu'on fait le plus souvent dans les sciences démonstratives ; il en va ainsi parce que, si la conclusion est vraie, la méthode résolutive permet de trouver facilement une proposition déjà démontrée, ou d'arriver à un principe connu par soi ; mais si la conclusion est fausse, on peut continuer à l'infini sans jamais rencontrer de vérité déjà connue, sauf à rencontrer une impossibilité ou absurdité manifeste. N'en doutez point, Pythagore, bien longtemps avant de trouver la démonstration pour laquelle il fit une hécatombe, s'était assuré que, dans le triangle rectangle, le carré du côté opposé à l'angle droit était égal aux carrés des deux autres côtés ; la certitude de la conclusion aide beaucoup à trouver la démonstration, toujours s'il s'agit de sciences démonstratives.
Mais, quelle que soit la façon dont Aristote ait procédé, que le raisonnement a priori ait précédé le recours a posteriori au sens ou l'inverse, il suffit qu'Aristote (on l'a dit plusieurs fois) donne la préséance aux expériences sensibles sur tous les raisonnements ; quant aux raisonnements a priori, on en a déjà examiné la force."
Galilée, Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, 1632, Première journée, tr. fr. René Fréreux et François de Gandt, Points sciences, 2000, p. 147-148.
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