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Texte à méditer :  Aucune philosophie n'a jamais pu mettre fin à la philosophie et pourtant c'est là le voeu secret de toute philosophie.   Georges Gusdorf
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Hors des sentiers battus
Richesse et complexité de la nature

  "La nature est un système, l'univers est une harmonie, la totalité est une liaison. Rien n'est isolé. « Tout est systématique dans l'Univers, tout y est combinaison, rapport, liaison, enchaînement. » Contemplé dans une telle perspective, l'univers est objet d'admiration et d'une admiration dont le double principe est en soi remarquable. À l'admiration des lois générales s'adjoint l'admiration de la surabondance des détails ; à l'admiration de la simplicité et de l'ordre, celle de la multiplicité et de la richesse. La magnificence de la création se célèbre sur un double registre, intellectuel et imaginatif. La raison s'exalte de comprendre le Plan de la Création, d'en mesurer et d'en approuver les dispositions générales, et de pénétrer la perfection de la totalité sous son aspect de système. Mais la maîtrise intellectuelle de la grandiose simplicité des lois et des forces se double d'un émerveillement de l'imagination devant la richesse infinie des formes, des gradations, des variations, des illustrations particulières. L'imagination est confondue, l'imagination est débordée, « l'imagination succombe sous le poids de la Création » : c'est un thème constant et ce n'est pas une clause de style. Il est très important que le finitisme du système de la machine du monde ait pour contrepoint la surabondance absolue du détail du plein. L'esprit trouve ainsi sa sécurité dans la satisfaction d'une double exigence : la généralité de l'ordre est connaissable, cependant que la richesse et la variété des formes naturelles est telle que nous ne saurions la concevoir, que nous n'aurions pu l'inventer, qu'elle nous dépassera et nous surprendra toujours. C'est le double avantage de l'ordre intellectuel et de la richesse sensible. L'imagination ne demande pas autre chose que l'indéfini au niveau de l'exclamation. Un système de la nature, un système du monde a beau satisfaire aux exigences intellectuelles de la raison ; il est parfaitement satisfaisant s'il satisfait aussi aux démesures de l'imagination, s'il y a dans sa plénitude un illimité qui comble la « volupté d'essoufflement » et l'esprit fini qui le contemple. Que l'imagination soit débordée, qu'elle soit certaine de se trouver toujours dans le milieu de la surabondance, dans l'élément du surplus, ce n'est pas seulement une ivresse, c'est surtout une garantie."

 

Judith Schlanger, Les Métaphores de l'organisme, 1971, Vrin, p. 62.



  "Les organisme ne sont pas des boules de billard, mises en mouvement par de forces externes, simple et mesurables et se dirigeant sur le tapis vert de la vie vers de nouvelle positions prévisibles. Les systèmes complexes ont une richesse plus grande. Les organismes ont une histoire qui pèse sur leur avenir de multiples façons. La complexité de leurs formes entraîne une foule de fonctions accompagnant toute les pressions éventuelles de la sélection naturelle qui ont pu régir la construction initiale. Le cheminement du développement embryonnaire, compliqué et en grande partie inconnu, montre bien que des causes simples (des changements mineurs des taux de croissance par exemple) peuvent se traduire par des changement nets et surprenants dans l'organisme adulte.
  Charles Darwin a choisi de clore son ouvrage [L'Origine des espèces] par une comparaison saisissante qui exprime toute cette richesse. Il y oppose d'une part le système simple du mouvement des planètes et son résultat, le cycle infini et statique, et d'autre part la complexité de la vie et sa transformation, merveilleuse et imprévisible, à travers les siècles.

  « Il y a de la noblesse dans une telle manière d'envisager la vie, avec ses puissances diverses attribuées à l'origine par un souffle créateur, à un petit nombre de formes, ou même à une seule ; et, tandis que notre planète a continué de tourner sur son orbite selon les lois immuables de la gravitation, sorties de presque rien, une quantité infinie de formes, de plus en plus belles, de plus en plus merveilleuses, n'ont pas cessé d'évoluer et évoluent encore. »"

 

Stephen Jay Gould, Le Pouce du panda, 1980, tr. fr. Jacques Chabert, Grasset, 1982, p. 14, Le Livre de Poche, 1996, p. 13-14.

 

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Date de création : 24/01/2016 @ 09:59
Dernière modification : 24/01/2016 @ 10:04
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