Lorsque Freud découvre au début de ce siècle la réalité de l'inconscient, il semble qu'il mette à jour chez l'homme des mécanismes incompatibles avec la liberté. En effet, l'inconscient n'est pas seulement un monde ignoré du sujet, c'est un monde rendu indépendant du sujet par le refoulement et les "résistances". Ce n'est pas seulement une partie de lui-même qu'il ne connaît pas, c'est aussi une partie qu'il ne peut pas connaître. De là un déterminisme qui échappe au contrôle de l'individu, aussi bien dans le détail de ses actes (rêves, actes manqués, humeurs, réactions...) que dans l'ensemble de son existence : l'individu ne paraît-il pas conditionné par son enfance ? N'est-il pas coincé entre des pulsions qui le rendent esclaves de son corps, des interdits sociaux qui l'enferment dans des complexes et enfin des formations imaginaires difficilement sublimées (art, religion, port, politique...) où il s'illusionne ?
Si l'on définit la liberté comme la capacité de l'individu de maîtriser les forces qui sont en lui, de les diriger par la volonté et, de façon plus générale, à la manière de Sartre, comme la possibilité pour l'individu de se choisir lui-même en se faisant par ses actes, il peut sembler que le déterminisme inconscient découvert par Freud soit, par définition, contradictoire avec la liberté.
Mais cette opposition ne repose-t-elle pas sur un malentendu, sur une vision superficielle des mécanismes inconscients ? Ne peut-on pas montrer que ceux-ci sont les processus fondamentaux par lesquels, à l'échelle de l'humanité, l'homme construit sa liberté ?
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