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Texte à méditer :  Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m'est étranger.   Terence
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Hors des sentiers battus
La fin de l'histoire

  "Nous vivons encore dans l'histoire, mais le moment approche où nous en sortirons, où nous en serons sortis ; bien plus, en droit, l'histoire est déjà arrivée à son terme, et ce n'est que par la faute de notre inconscience qu'elle dure encore dans les faits, que pour parler concrètement, nous connaissons encore des guerres, des révolutions, des injustices et des luttes libératrices ; si elles sont nécessaires pour rendre visibles aux obtus que nous sommes, ce que la pensée d'hommes clairvoyants a déjà discerné depuis longtemps, comme la fin inévitable et en même temps heureuse de l'histoire, elles ne sont plus justifiées au jugement de la raison.
  Il sera utile de s'entendre sur les termes que nous venons d'employer. La fin de l'histoire peut être une fin par extinction de l'homme, sujet de l’histoire, par la disparition de l'humanité, soit qu'elle se détruise elle-même, soit que la lente transformation des conditions naturelles conduise au même résultat. Parler d'histoire n'aurait alors plus de sens : seul de tous les êtres que nous connaissons, l'homme a une histoire, en ce sens qu'il a conscience de son passé, et par extension, de celui de la terre, des animaux, du cosmos : aucun être non-humain ne se souvient de ce qui est arrivé à ses aïeux, aucun n'anticipe l'avenir, parce qu’aucun n'est doué de langage, c'est-à-dire de pensée et qu'aucun ne peut parler du possible, de cette toile de fond sur lequel le réel se détache pour devenir significatif. Il n'y a pas d'histoire pour qui n'est pas capable de dire : cela aurait pu se passer autrement, de comprendre ainsi ce qui s'est passé réellement. L'humanité disparue il n'y aurait plus d'histoire. Et ce qui se produirait - se produira, dira le pessimiste - en cas de suicide de l'humanité se produira de façon encore plus radicale, si l'on peut dire, en cas de disparition de notre monde".

Éric Weil, Philosophie et réalité, 1982, Éditions Beauchesne, pp. 167-168.


 
  "La fin de l'histoire prend [...] un tout autre sens : la fin, c'est maintenant le but, ce que l'homme, ce que l'humanité visent, ce qu'ils attendent ou ce qu'ils veulent atteindre. La fin de l'histoire, c'est la fin de nos malheurs, de ces malheurs dont nous ne nous trouvons pas responsables, qui nous arrivent, nous tombent dessus. Il semble bien qu'il en ait été toujours ainsi ; mais si le désir est omniprésent, s'il est difficile de trouver une époque, une civilisation qui ne l'aient connu, il n'en n'est pas moins frappant que nous soyons les premiers à formuler ce désir comme nous le faisons. En effet, l'humanité a toujours désiré la fin de ses souffrances, elle a toujours été convaincue que ses malheurs, s'ils étaient de sa faute, n'étaient pourtant pas imputables aux vivants, ne relevaient pas de la mauvaise volonté des individus composant l'humanité actuelle : ils provenaient d'une faute commise au début des temps, ils remontaient à une lutte entre des divinités bonnes et mauvaises, à une fatalité aveugle et l'humanité espérait la fin de cette mauvaise histoire d'un événement extérieur, d'un miracle, d'un autre tour de roue du sort. En un mot, on espérai t; nous autres, nous ne nous limitons pas à l'espoir, et si l'espérance est nécessaire afin que l'homme entreprenne, cette espérance, maintenant, veut : l'homme veut la fin des temps historiques, autrement dit, il veut que la violence, l'injustice, la souffrance non coupable cessent et disparaissent. Plus simplement encore, l'homme, à notre époque, agit, veut agir, voudrait agir, prétend agir, en tout cas, se comprend comme être agissant, en agissant en vue de la fin de cette histoire qu'il ne connaît que trop bien. Il se sent responsable, sinon individuellement, du moins comme membre de la communauté humaine, et il affirme que, si l'histoire dure encore, c'est de sa faute et qu'il doit changer, qu'il peut changer le cours des choses".
 

Éric Weil, Philosophie et réalité, 1982, Éditions Beauchesne, p. 170.


 
  "La plus grande peur de Nietzsche était que l'American way of life dût triompher, mais Tocqueville était résigné au caractère inéluctable de sa diffusion générale et s'en satisfaisait jusqu'à un certain point. A la différence de Nietzsche, il était sensible aux petites améliorations qu'une démocratie apportait dans la vie de la masse des petites gens. En tout état de cause, il sentait que la marche en avant de la démocratie était si inexorable que toute résistance était à la fois sans espoir et contreproductive : ce qu'on pouvait espérer de mieux était d'instruire les fervents partisans de la démocratie qu'il existait de sérieuse alternatives à leur régime favori, lequel ne pouvait être préservé qu'en modérant la démocratie elle-même.
  Alexandre Kojève partageait la croyance de Tocqueville dans le caractère inéluctable de la démocratie moderne, et concevait lui aussi son prix en termes similaires. Si l'homme est en effet défini par son désir de lutte pour la reconnaissance et par son travail pour dominer la nature, et s'il obtient à la fin de l'Histoire aussi bien la reconnaissance de son humanité que l'abondance matérielle, alors l' « Homme proprement dit » cessera d'exister parce qu'il aura cessé de travailler et de lutter".

 

Francis Fukuyama, La Fin de l'Histoire et le dernier homme, 1992, tr. fr. Denis-Armand Canal, Champs Flammarion, p. 350.
 

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Date de création : 11/11/2006 @ 12:34
Dernière modification : 22/02/2024 @ 15:30
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