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Texte à méditer :   Un peuple civilisé ne mange pas les cadavres. Il mange les hommes vivants.   Curzio Malaparte
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Hors des sentiers battus
Liberté et autrui

 "Au point de vue barbare, liberté est synonyme d'isolement : celui-là est le plus libre dont l'action est la moins limitée par celle des autres ; l'existence d'un seul individu sur toute la face du globe donnerait ainsi l'idée de la plus haute liberté possible. — Au point de vue social, liberté et solidarité sont termes identiques : la liberté de chacun rencontrant dans la liberté d'autrui, non plus une limite […] mais un auxiliaire, l'homme le plus libre est celui qui a le plus de relations avec ses semblables.
 Ces deux manières de concevoir la liberté s'excluant l'une l'autre, il en résulte que la liberté du sauvage ne peut pas être rationnellement et justement revendiquée par l'homme vivant en société : il faut choisir.
 Deux nations sont séparées par un bras de mer, ou une chaîne de montagnes. Elles sont respectivement libres, tant qu'elles ne communiquent point entre elles, mais elles sont pauvres ; c'est de la liberté simple : elles seront plus libres et plus riches si elles échangent leurs produits ; c'est ce que j'appelle liberté composée. L'activité particulière de chacune de ces deux nations prenant d'autant plus d'extension qu'elles se fournissent mutuellement plus d'objets de consommation et de travail, leur liberté devient aussi plus grande : car la liberté, c'est l'action. Donc l'échange crée entre nations des rapports qui, tout en rendant leurs libertés solidaires, en augmentent l'étendue : la liberté croît, comme la force, par l'union."
 
Proudhon, Les Confessions d'un révolutionnaire, pour servir à l'histoire de la révolution de février, 1849, in Justice et liberté, PUF, 1974, p. 93.


    "Par conséquent, en dépit de la grand influence que le concept d'une liberté intérieure non politique a exercé sur la tradition de la pensée, il semble qu'on puisse affirmer que l'homme ne saurait rien de la liberté intérieure s'il n’avait d'abord expérimenté une liberté qui soit une réalité tangible dans le monde. Nous prenons conscience d'abord de la liberté ou de son contraire dans notre commerce avec d'autres, non dans le commerce avec nous-même. Avant de devenir un attribut de la pensée ou une qualité de la volonté, la liberté a été comprise comme le statut de l'homme libre, qui lui permettant de se déplacer, de sortir de son foyer, d'aller dans le monde et de rencontrer d'autres gens en acte et en paroles. Il est clair que cette liberté est précédée par la libération : pour être libre, l'homme doit s'être libéré des nécessités de la vie. Mais le statut d'homme libre ne découlait pas automatiquement de l'acte de libération. Être libre exigeait, outre la simple libération, la compagnie d'autres hommes, dont la situation était la même, et demandait un espace public commun où les rencontrer – un monde politiquement organisé, en d'autres termes, où chacun des hommes libres pût s'insérer par la parole et par l'action. […]

  La liberté comme fait démontrable et la politique coïncident et sont relative l'une à l'autre comme les deux côté d’une même chose".


Hannah Arendt, "Qu'est-ce que la liberté ?", 1960, in La Crise de la culture, tr. fr. Agnès Faure et Patrick Lévy, Folio, p. 192 et p. 193.


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Date de création : 15/09/2007 @ 17:35
Dernière modification : 03/05/2013 @ 11:02
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