"Découvrir en mathématiques des théorèmes importants et féconds, tout comme découvrir dans les sciences empiriques des théories importantes et fécondes, exige un don d'invention, de l'imagination et une intuition pénétrante. D'un autre côté, on sauvegarde les intérêts de l'objectivité scientifique en exigeant une validation objective des conjectures que l'on a faites. En mathématiques, cette validation consiste en une démonstration par dérivation déductive à partir d'axiomes. Quand la conjecture dont on a eu l'idée est une proposition mathématique, sa démonstration ou sa réfutation exigent encore un esprit d'invention et une habileté souvent extrêmes ; car les règles d'inférence déductive ne fournissent même pas une procédure mécanique générale pour construire des preuves ou des réfutations. Le rôle méthodologique de ces règles est modeste ; elles servent plutôt de critères pour juger de la solidité des raisonnements présentés à titre de démonstrations ; un raisonnement constituera une démonstration mathématique valide s'il conduit des axiomes au théorème proposé par une chaîne d'inférences successives dont chacune est valide au regard de l'une des règles d'inférence déductive. Et vérifier si un raisonnement donné est une démonstration valide en ce sens est, bien entendu, un travail purement mécanique."
Carl Hempel, Éléments d'épistémologie, 1966, Chapitre 2, tr. fr. Bertrand Saint-Sernin, Armand Colin, 1996, pp. 25-26.
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